Traitement des déviations vertébrales : 45 ans d’expérience
en Médecine Physique et Rééducation
Introduction
Il est très difficile de transmettre l’expérience, mais comme le dit Jean
Dubousset : « La réflexion de quelques uns ouvre toujours des chemins pour
d’autres »
J’ai
soutenu ma thèse sur les scolioses infantiles en 1975. A cette époque elles
étaient encore fréquentes et sans doute liées au rachitisme. Avec Pierre
Stagnara, nous avions décrit une entité particulière : la scoliose infantile
paradysplasique et hypotrophique.
Ce
travail nous a donné l’occasion de vérifier l’efficacité du corset de Milwaukee
qui était utilisé à Lyon depuis 1970 et qui dans certains cas permettait de
guérir des scolioses.
Les
corsets plâtrés étaient régulièrement utilisés pour les scolioses infantiles et
la grande spécialiste Min Mehta m’en a appris tous les secrets à l’occasion d’un
voyage à Londres. Actuellement, cette technique continue à être utilisée comme
en témoigne les sites internet spécialisés. Le nouveau corset lyonnais ARTbrace
permet de remplacer le plâtre du "serial casting", dans des conditions bien
meilleures pour l'enfant et en évitant les anesthésies.
Etiologie de la Scoliose
Durant ces nombreuses années j’ai cherché comme bien d’autres à l’intérieur
du Groupe d’Etudes sur la Scoliose, l’origine de la scoliose idiopathique. «
Sans la théorie, la pratique ne devient qu’une habitude ennuyeuse. La théorie
seule permet d’aller de l’avant et de développer l’esprit d’invention » disait
louis Pasteur.
La
scoliose existe chez le poisson, mais il s’agit de scolioses pathologiques par
déficit d’acide ascorbique, ou de pathologies proches de la neurofibromatose ou
encore de malformations congénitales. C’est avec la verticalisation et la
bipédie, le rachis devenant une chaine cinétique ouverte que nait la scoliose
dite idiopathique.
La
mélatonine et la calmoduline ont été très étudiées par Machida et Lowe et
beaucoup pensaient que le taux de calmoduline permettait de prévoir
l’évolutivité de la scoliose. Ce concept s’est avéré faux car la sécrétion de
mélatonine est très différente chez le poulet et chez l’homme et le taux de
calmoduline augmente avec la scoliose évolutive, mais n’est en aucun cas un
prédicteur d’évolutivité. « Le succès est fait de 99 % d’échec » disait Soichiro
Honda.
De nombreuses théories pathogéniques ont vu le jour : Cheng à Hong Kong démontre
que la croissance vertébrale antérieure est relativement plus importante que la
croissance postérieure (Relative Anterior Spinal Growth ou RASO). Cette théorie
permet de comprendre le dos plat habituel, mais comment expliquer les
cypho-scolioses ?
Avec
Johannes Dimnet , nous avons mis en évidence l’instabilité rotationnelle de la
vertèbre apicale lorsque la rotation dépasse 25° à l’apex de la courbure. Lors
de la flexion du tronc en avant, les vecteurs schématisant la force musculaire
de la concavité et de la convexité se situent du même côté par rapport au centre
instantané de rotation du corps vertébral. Dans cette situation, une extension
du rachis aggrave la rotation du corps vertébral.
La
rapidité du mouvement peut dépasser la visco-élasticité (élasticité à vitesse
lente) du système musculo ligamentaire paravertébral lors du même mouvement de
flexion-extension. C’est l’effet triporteur. Pour un même virage, lorsqu’il est
abordé à vitesse lente, tout va bien, lorsque la vitesse est trop rapide, le
triporteur va déraper.
Certaines
scolioses sont manifestement neurologiques avec mise en évidence d’une
syringomyélie. Elles sont très particulières avec courbures à grand rayon, forte
rigidité et importante gibbosité lors de la flexion antérieure du tronc. On a
évoqué un découplement ou asynchronisme de la croissance neuro osseuse
vertébrale. Mais toutes les scolioses sont loin d’être neurologiques.
La latéralisation est caractéristique de l’homo sapiens avec 90 % de droitiers
et sans doute la même proportion de scolioses thoraciques droites pour les
scolioses juvéniles et de l’adolescent.
Par
contre les scolioses infantiles qui débutent avant l’âge de 3 ans, c'est-à-dire
avant la latéralisation ont dans 50 % une convexité à gauche. Ce n’est que vers
l’âge de 7 ans que l’enfant est totalement latéralisé, c’est également à cette
date qu’il développe une stratégie de marche de type adulte. A l’adolescence,
lorsque la scoliose est thoracique gauche, il s’agit le plus souvent d’un
gaucher.
Les mécanismes de l’équilibration se développent progressivement avec l’homo
sapiens comme en témoignent les travaux de Fred Spoor de Liverpool sur
l’empreinte des canaux semi-circulaires du grand singe et de l’homme. Dans la
scoliose, les maladies du système postural provoquent des scolioses comme dans
la maladie de Friedreich,
Yamada retrouve 79 % d’anomalies de fonctionnement du système postural. (groupe
témoin 5 %). Mais ces anomalies disparaissent à l’âge de 20 ans.
Sahlstrand retrouve chez le scoliotique 65 % de dysfonctionnements vestibulaires
Herman et Mac Ewen montrent une perturbation de la régulation entre vision et
cervelet
La fréquence des scolioses chez les filles s’expliquerait par une croissance
pubertaire avant que le système nerveux central ne soit mature. C’est le NOTOM (Neuro
osseous Timing of Maturation)
Génétique de la scoliose
Le
monde végétal présente également des anomalies. Dans la nature les pins sont les
arbres les plus droits, ils servaient autrefois à fabriquer les mâts des navires.
Dans la forêt de Kurshskaia Kosa il existe une zone où les pins sont
scoliotiques. Cette zone a été un terrain d’expérimentation nazie durant la
seconde guerre mondiale. Ces pins sont la résultante d’un Organisme
Génétiquement Modifié ; en est-il de même pour les scolioses chez l’homme ?
La scoliose est associée à une centaine de maladies génétiques qui touchent tous
les chromosomes.
En
clinique nous pouvons étudier les scolioses chez les jumeaux monozygotes qui ont
la même génétique et le même environnement. La scoliose est souvent différente
et il est même décrit des jumeaux dont l’un a la scoliose et l’autre pas. Nous
attendons depuis plusieurs années les tests génétiques d’évolutivité de la
scoliose…
Ce rapide tour d’horizon nous montre que la scoliose résulte de causes
multiples. Le diagnostic de scoliose idiopathique est en fait une absence de
diagnostic, et en fait le modèle qui se rapproche le plus de celui de la
scoliose est la théorie du chaos.
Scoliose et Théorie du chaos
La scoliose est la représentation concrète de la théorie du chaos appliquée
au rachis :
Un système chaotique est :
- Ouvert. La verticalité permet les échanges avec l’extérieur.
Le rachis est une chaîne cinétique ouverte.
- Imprévisible. C’est l’effet papillon. Est-ce qu’un vol de
papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas ? se demandait Edward
Lorentz. En fait La pomme tombe suivant les lois de gravitation de Newton et
l’on peut prévoir le lieu de sa chute. La feuille de l’arbre tombe suivant
les mêmes lois, mais on ne peut pas prévoir le lieu exact de la chute, parce
qu’elle est plus sensible au vent. L’imprévisibilité de tels phénomènes
résulte d’une sensibilité extrême aux conditions initiales, c’est le chaos
déterministique.
« Si un flocon de neige peut déclencher une avalanche alors la prédiction
par le calcul nous dira très exactement quel flocon de neige précis
intercepter pour que l'avalanche ne se produise pas ! » En fait : un état
hypercritique reste un état hypercritique, et supprimer ce flocon
particulier ne ferait que « permettre à un autre de le remplacer dans cette
fonction ». Rien ne serait donc résolu (point de vue admis aujourd'hui). Les
flocons de neige qui représentent uns structure fractale sont tous
différents, un peu comme les scolioses, ainsi qu’en témoignent les
nombreuses classifications…
- Complexe. L’étiologie de la scoliose est complexe,
multifactorielle. Lorsque nous réunissons dans un ordinateur les différentes
caractéristiques des scolioses évolutives : Le dos plat, l’importance de la
rotation, l’hyperlaxité, les troubles de l’équilibre… aucune de ces
caractéristiques ne s’avère être un critère prédictif. Seule une angulation
de plus de 25° caractérise les scolioses évolutives, mais à ce stade, nous
ne sommes plus en phase chaotique. Par exemple, nous voyons souvent des dos
plats sans scoliose évolutive. De même, les mamans rapprochent souvent la
scoliose d’une mauvaise attitude avec port asymétrique du cartable, ce qui
est sans doute vrai, mais la scoliose structurale est loin d’être la règle
chez les hémiplégies infantiles et les amputés congénitaux.
- Discontinu. Nous avons déjà évoqué le problème du seuil
biomécanique de 25° de rotation à l’apex de la cyphose.
- Déterministique. La survenue d’une scoliose n’est pas due
au seul hasard. On trouve toujours de bonnes justifications à l’évolutivité
de la scoliose. Les lois de la mécanique stochastique ne sont pas
utilisables.
- Modélisable. C’est la 4° dimension ou dimension fractale
qui permet de modéliser la scoliose. Une dimension fractale contient
infiniment plus d’information qu’une dimension de coordonnées.
Quand
on précise l’échelle, elle nous en fournit la longueur.
Il
est étonnant de constater qu’une formule mathématique fractale fournit une
image très proche de certains organes comme le cerveau, les bronches, les
villosités intestinales.
- Changement de phase. Ces images concernent essentiellement
les organes qui constituent une interface entre gaz, liquides et solides. La
puberté, caractéristique de l’homo sapiens, constitue en quelque sorte un
changement de phase avec passage de l’enfance à l’état adulte. La puberté
Est une caractéristique de l’homo sapiens. Elle permet de gagner 3 ans sur
une croissance linéaire.
En pratique cette théorie modifie le comportement du médecin au niveau du
traitement et de la prévention. Le traitement soit disant étiologique de la
scoliose par un appareil dentaire ou une semelle n’a pas plus de sens que
d’aller à la chasse au papillon pour éviter la tornade au Texas. Le système
chaotique ne fonctionne que dans un sens. De même, si la scoliose dite mineure
évolue malgré la kinésithérapie, ce ne sera pas la « faute » du kinésithérapeute,
pas plus que la construction antisismique ne peut éviter le tremblement de terre.
Enfin, il faut revoir toute la prévention et le dépistage de la scoliose.
Cette approche repose le problème de la chirurgie et nous citerons Alain
Dimeglio : « Relativiser la chirurgie de la scoliose. – Malgré la flamboyance
des nouvelles instrumentations et de leurs attraits, il ne faut pas perdre de
vue que la chirurgie de la scoliose est une chirurgie dévastatrice et agressive.
Elle signe implicitement un constat d’échec : faute de s’attaquer à la vraie
cause, le chirurgien n’a pour seul recours que l’arthrodèse ; la radio post-opératoire
nous montre certes la réduction de la scoliose, mais nous renvoie aussi l’image
de notre propre ignorance. Il faut accepter avec perplexité les nouvelles
instrumentations, même si elles constituent un progrès. »
Les échecs furent nombreux.
- Il faut citer la stimulation électrique fonctionnelle développée dans
les années 1980 et qui a mis près de 10 ans à prouver son inefficacité à
prévenir la progression de la scoliose chez les adolescents.
- L’objectif O fut également un échec. L’idée de mettre un « petit
corset » à « petit angle » même si nous ne sommes pas surs de l’évolutivité
de la scoliose n’a pas donnée les résultats escomptés. Les orthèses
élastiques type « Olympe » ne sont plus utilisées actuellement.

Que savons-nous actuellement et réellement après 45 ans de recherche sur la
scoliose ?
- Elle évolue pendant la poussée de croissance
- La prédominance est féminine
- Il existe une grande variété de déformations
- Il existe un caractère familial
20 minutes d’observation d’une consultation spécialisée de scoliose permettent
d’aboutir aux mêmes conclusions.
Le dépistage précoce conserve toute son importance. Dans 10 % des cas,
la scoliose évolue avec une autre maladie. Il faut prévenir les parents de la
nécessité de la surveillance pour ne traiter que les seules scolioses évolutives
et éviter de mettre en place un corset inutile sur une scoliose qui n’évoluera
pas. La fréquence des scolioses de plus de 10° est de 2 % de la population,
alors que la fréquence de celles qui évoluent et justifient un traitement
orthopédique conservateur n’est que de 2/1000 soit une sur 10. C’est pourquoi
aujourd’hui la limite des indications reste celles fixées par la SRS soit 20°
entre 11 et 13 ans pour les filles et 30° entre 13 et 15 ans.
Qu’en est-il des traitements orthopédiques conservateurs ?
Nous avons évoqués en introduction le corset de Milwaukee à l’occasion des
scolioses infantiles. Nous insisterons davantage sur le « corset lyonnais » mis
au point par Stagnara et Bouillat Terrier après la deuxième guerre mondiale.
Initialement
en cuir –acier, sa caractéristique principale est d’être réglable. L’utilisation
du polymétacrylate de méthyle ou plexidur a été un grand progrès technique, la
fixation des plaques étant possible directement par taraudage sans contre écrou.
Ce corset était par tradition et est toujours précédé d’un ou plusieurs corsets
plâtrés.
Le concept d’intégrité tensionnelle permet de mieux comprendre le rôle du
plâtre (ou du corset "Total Time").
La mécanique newtonienne modélise la colonne vertébrale comme une structure
flexible verticale contre la pesanteur, mais ne permet pas d’expliquer le
caractère omnidirectionnel du rachis.
La mécanique newtonienne traditionnelle ne permet pas d’expliquer l’efficacité
de la musculature paravertébrale, par exemple lors d’un effort de soulèvement de
charge. La résistance à la charge des muscles paravertébraux est de 3000 Newtons.
En mécanique newtonienne, lors d’un soulèvement de poids, la charge atteint 16
000 Newtons. En fait le rachis jeune est beaucoup plus qu’un système newtonien,
il est capable de se mouvoir en apesanteur (NASA) et parfois défie les lois de
la pesanteur.
Kenneth Snelson a sculpté des structures de type intégrité tensionnelle. Ces
sculptures ont la caractéristique d’être stables dans tous les plans de l’espace.
Le rachis ressemble étrangement à certaines de ces sculptures.
Défini par l’architecte R. Buckminster Fuller en 1920, le concept d’intégrité
tensionnelle a été contracté en TENSEGRITY.
En biomécanique, l’intégrité tensionnelle est la propriété des objets dont les
composants usent tension et compression de telle sorte que la force et la
résistance dépassent la somme de celles de leurs composants. Ainsi les os et les
muscles agissent en unisson pour se renforcer.
Les caractéristiques d’un système à intégrité de tension sont :
- Le système est omnidirectionnel et permet les figures sportives
de gymnastique et de patinage. De même en apesanteur dans l’espace, la
colonne vertébrale reste fonctionnelle.
- La structure de base est le triangle qui offre la meilleure
stabilité. Par exemple le ballon de football est une structure d’intégrité
tensionnelle associant pentagones et hexagones en un icosaèdre tronqué. Un
icosaèdre est plus stable que la sphère correspondante. Au niveau du rachis
l’insertion de la musculature superficielle et profonde est triangulaire,
caractéristique d’un système à intégrité tensionnelle. Le disque
intervertébral est également une structure d’intégrité tensionnelle. Le
Nucléus pulposus subit des contraintes verticales en COMPRESSION. L’annulus
fibrosus subit des contraintes tangentielles en TENSION. Les Lamelles
concentriques disposées de façon oblique d’une couche à l’autre : 30° par
rapport au plan du disque, 120° entre elles.
- Le modèle est non linéaire. La structure rigide est en
compression discontinue et la structure flexible en tension continue.
L’exemple de la caravane permet de mieux comprendre la non linéarité. En
montée la traction ou tension est continue et convergente ; en descente la
poussée ou compression est discontinue et divergente. D’où les limitations
de vitesse sur autoroute.
La
non linéarité est également géométrique. Si l’on prend l’exemple du tendeur
de la corde à linge, un déplacement de quelques mm augmente considérablement
la tension et la résistance. La viscoélasticité est non linéaire et cette
non linéarité s’observe dans tous les tissus conjonctifs.
- Il existe une invariance d’échelle : la taille est
théoriquement illimitée. Les dômes géodésiques peuvent théoriquement couvrir
une ville. En mécanique newtonnienne, un animal de taille supérieure au lion
serait impossible. Le cou des dinosaures de 10 mètres de long fonctionne
dans toutes les positions. Le muscle augmente sa force lorsque sa surface de
section augmente. L’os augmente de section non du fait de la compression,
mais du fait des tensions de la matrice de collagène.
- La force et la résistance de l’ensemble dépassent celles de leurs
composants. L’exemple du ballon de baudruche est caractéristique. La tension
continue de l’enveloppe du ballon lutte contre les molécules d’air à
l’intérieur qui chacune repousse l’enveloppe de façon discontinue.
L’ensemble est beaucoup plus résistant que la mince enveloppe de caoutchouc.
- Le maximum de stabilité est obtenu avec un minimum de matériau.
- L’énergie consommée est faible.
- La charge appliquée est distribuée dans toute la structure. La
pression au niveau du point d’appui se transmet à l’ensemble de la
structure. Les rayons de la roue de bicyclette doivent être bien tendus
sinon la roue se voile.
- Tous les éléments doivent rester indépendants. La structure
anatomique du corps vertébral avec ses apophyses épineuses et transverses
évoque un système d’intégrité de tension. Toutes les structures osseuses
apophysaires doivent être indépendantes. Lorsqu’elles ne le sont plus avec
l’âge, lors d’une spondylarthrite ankylosante ou après chirurgie scoliotique,
le mécanisme d’intégrité tensionnelle est perdu et la colonne perd son
omnidirectionnalité.
- Le principe est universel. Le carbone existe sous 2 formes
pures. La forme classique qui est le graphite et la forme à structure
d’intégrité tensionnelle qui est le diamant.
Rôle élastique des tenseurs :
Les ligaments sont sous tension continue. Le ligament jaune est celui qui
contient le plus d’élastine. C’est l’élastique de la colonne. Il absorbe
l’énergie et la restitue en mobilisant la charge. Si on les coupe (chirurgie),
la solidité de l’ensemble diminue.
Nouvelle modélisation du rachis
Ce sont les tissus mous autour du rachis qui, sous une tension appropriée,
maintiennent et peuvent soulever l’ensemble du rachis. Le rachis n’est plus une
colonne avec un empilement de vertèbres, mais une structure à intégrité de
tension. Les ligaments paravertébraux sont sous tension continue lorsque le
rachis est au repos. La longueur des muscles paravertébraux au repos est telle
qu’ils sont en permanence sous tension. Les vertèbres et les disques sont en
compression discontinue.
Fluage (creep)
Une tension constante au niveau d’un ligament va provoquer un fluage, c'est-à-dire
une modification réelle de la longueur du ligament. Au bout de 3 semaines de
tension continue les fibres de collagène se réalignent progressivement. Lorsque
l’on maintient expérimentalement un rat en bending latéral pendant 5 semaines,
il développe une scoliose identique à la scoliose structurale.
Résultats des traitements de scoliose sans plâtre.
Lori Dolan et Stuart Weinstein ont effectué une revue systématique de la
littérature, essentiellement de niveau III et IV. Les résultats sont
contradictoires et non concluants. En l’état actuel des connaissances en matière
d’appareillage la balance des résultats publiés basés sur l’évidence ne permet
pas de conseiller (ou d’interdire) l’usage du corset pour traiter une scoliose
chez un enfant.
A Lyon, nous n’avons pas modifié le management depuis plus de 50 ans. Nous
disposons de résultats cohérents et à long terme qui constituent l’une des
statistiques mondiales les plus importantes. Les résultats du traitement
orthopédique conservateur de 1228 scolioses sont évalués selon les critères
internationaux. Globalement, l’angulation est améliorée et stabilisée dans 89 %
des cas. L’indice d’effectivité est donc de 0,89. Les mêmes résultats sont
obtenus pour 177 scolioses traitées à Risser O en début de traitement. Si
l’angulation reste stable, la gibbosité est réduite de moitié. Les échecs vrais
concernent les scolioses qui ont été opérées ou qui justifient un traitement
chirurgical. Pour une angulation inférieure à 45°, le taux d’échecs est de 2 %.
Pour une angulation initiale supérieure à 45°, le taux passe à 20 %.
Les derniers développements de la Recherche
En 2010 deux médecins généralistes de la Sécurité Sociale, les Drs Anne
Dominjon et Pascale Brillat, décident d' interdire la kinésithérapie réalisée à
l'occasion de la confection du plâtre d'abbott en ambulatoire. Même si elles
seront plus tard désavouées par le Conseil National de l'Ordre des Médecins et
le Conseil d'état, la seule Unité de Médecine Orthopédique et Rééducation en
Rhône Alpes est fermée. Pour ne pas abandonner à la chirurgie 2000 patients en
corset, une solution doit être trouvée.
En 2013 le Dr de Mauroy est Président de la SOSORT et c'est à l'occasion du
congrès de Chicago que la solution est trouvée. La révolution numérique va
transformer radicalement le traitement orthopédique conservateur lyonnais.
Jean Claude de Mauroy crée le plâtre digital qui permet la réalisation du
nouveau corset lyonnais ARTbrace en polycarbonate. Le transfert du savoir
faire traditionnel permet d'éviter des hospitalisations onéreuses. Les résultats
sont spectaculaires avec correction en corset de plus de 70 %, alors que
la correction moyenne est de 30% à 40% selon les corsets. Les patients
affluent du monde entier. L'ARTbrace est porté à ce jour dans plus de 30 pays.
En 2015 la Société Orten réalise un nouveau digitiseur "corps entier"
spécialement pour l'ARTbrace. Cette nouvelle machine est installée en Italie, en
Chine et actuellement dans le monde entier. En France, malheureusement le
développement est bloqué par la Sécurité Sociale qui continue à rembourser
700 € de plus les corsets moins correcteurs en polyéthylène et à favoriser la
chirurgie. Dans ces conditions la formation est bloquée en France.
En conclusion,
La prise en charge conservatrice des scolioses idiopathiques
reste plus que jamais d'actualité et doit permettre de
se donner le maximum de chances de réussite du traitement par une bonne
connaissance de la biomécanique, l’utilisation d’un protocole et d’une orthèse
adaptée. C’est à cette condition que nous donnerons le maximum de chances à
l’enfant.

Auteur :
Dr Jean Claude de Mauroy (Médecine Orthopédique)
Cette page a
été mise à jour pour la dernière fois le : 30 mars 2018
"Conflit d’intérêts : l’auteur n’a pas transmis de conflit d’intérêts
concernant les données diffusées publiées dans cette page"
|